Courtisols : ses origines, son nom, son patois

La lettre adressée en 1776 par le savant troyen Grosley à l’Académie de Châlons pour avoir des renseignements sur le village de Courtisols,vint sur le bureau du président de la Société des Antiquaires de France quarante ans plus tard. Elle allait être à l’origine d’un long débat sur les origines et sur le patois de Courtisols ;
Les premiers écrits furent souvent l’œuvre d’érudits locaux, mais dès le milieu du XIXe siècle, les historiens et les linguistes s’intéressèrent à la question. Parmi eux figurent de grands noms de la recherche, et notamment des universitaires parmi lesquels figurent plusieurs membres de l’Institut (Académie des Inscriptions et belles-Lettres) : D’Arbois de Jubainville, Giry, Longnon, Lot, Meyer, Thomas. En outre des Allemands et des Belges (en particulier aujourd’hui Jean-Pierre Devroey) se sont beaucoup intéréssés à l’histoire de Courtisols au haut Moyen-Age et à son patois (et notamment la thèse allemande de J. Piel)
La littérature est donc abondante et on peut suivre l’histoire des différentes hypothèses. Au début du XIXe siècle, les différents auteurs – qui d’ailleurs se répètent souvent – prétendent que le village de Courtisols a été fondé par des suisses. Pourtant dès le milieu du XIXe siècle, certains linguistes notent que le patois de Courtisols est de l’ancien français, hypothèse qui s’est développée au cours des années, particulièrement après la publication, en 1905, de l’ouvrage d’Emile Guénard sur le patois de Courtisols. Cette hypothèse est aujourd’hui admise par les spécialistes.
Quant à l’origine du noms de Courtisols, si on excepte les cours isolées avancées par des érudits locaux qui témoignent d’une méconnaissance complète de la toponymie, les auteurs du XIXe siècle s’appuient que la plus ancienne mention dont ils avaient alors connaissance, Curtis Ausorum (en 991), que l’on croit écrit pour Curtis Anserum, la Cour aux Oies. Un peu plus tard, on attribue la fondation de Courtisols aux Aussi, une tribu totalement inconnue et dont on fait varier les origines.
En 1872, Auguste Longnon démontre que le plus ancien nom connu de Courtisols date de 847 et que le village se nommait alors Curtis Acutior. Pourtant cet auteur n’en tire aucune conclusion quant aux origines de Courtisols. Un pas important fut franchi en 1893 lorsque Antoine Thomas démontra comment on était passé de Curtis Acutior à Curtis Ausorum. Désormais tous les toponymistes allaient traduire Curtis Acutior par « domaine le plus élevé, domaine le plus aigu », traduction qui, toutefois, concorde mal avec le relief du lieu (on est surpris à ce propos de la remarque de Dauzat qui, en 1947, laisse entendre que le toponyme s’accorde à merveille avec la situation topographique de Courtisols… Ce qui est sûr, comme le prouvent la construction toponymique (curtis + adjectif comparatif) et les découvertes archéologiques, c’est que le territoire de Courtisols, qui comptait plusieurs centaines d’habitants au IXe siècle, était déjà très peuplé à l’époque gallo-romaine.
Et les Huns ? L’hypothèse d’une fondation de Courtisols par les huns blessés au cours de la bataille des Champs Catalauniques, apparaît dans les textes au milieu du XIXe siècle, mais elle date peut-être de la fin du XVIIIe siècle (c’est peut-être elle qui justifia la question posée par Grosley en 1776). L’argumentation pour justifier cette hypothèse est l’œuvre, en 1853, de l’abbé Boitel, qui n’avait qu’un seul objectif : prouver, contre Grosley, que la bataille des Champs Catalauniques a eu lieu dans les environs de Suippes et non pas dans les environs de tout. Ne pouvant justifier par des sources historiques sûres toutes ses proposition : il invente. Pendant un siècle, aucun scientifique ne reprit cette hypothèse. Et pourtant elles refleurit en 1925 et en 1953 dans les ouvrages de Geneviève Desvignes qui reprit le combat de l’abbé Boitel, en recopiant ses fausses preuves et en en ajoutant d’autres également créées de toute pièce. Le ton de son dernier ouvrage est d’ailleurs, comme celle de son prédécesseur, très polémique. Cette version des origines de Courtisols ne fut reprise, évidemment par aucun scientifique, historien ou linguiste… et pourtant c’est celle qui marqua le plus les esprits dans la région !
Et en 2008, le débat n’est pas clos, comme en témoigne deux articles parus l’un dans La France pittoresque (à propos des origines suisses et gallo-romaines de Courtisols) et l’autre dans le canard Enchaîné (où on évoque surtout les origines « hunniques »).
Nous avons donc essayé de rassembler tout ce qui avait été écrit sur Courtisols depuis le XVIIIe siècle. Nous donnons ci-dessous la liste des auteurs et vous pourrez trouver des extraits de textes (y compris les notes) dans le dossier PDF ci-joint. Nous n’avons pu cependant nous procurer certaines références… mais peut-être un internaute pourra-t-il nous les adresser…

Nous sommes à la recherche des extraits des ouvrages suivants parlant de Courtisols (numéros de pages approximatifs) :
Annales fribourgeoises, 1916, p. 16
Bibliothèque Universelle et Revue Suisse, 1920, p. 122
Gauchat (L.), Jeanjaquet (J.), Bibliographie linguistique de la Suisse romande. Glossaire des patois de la Suisse romane, p. 9
Labourasse (A.), Glossaire abrégé du patois de la Meuse, notamment de celui de Vouthons, 1887, p. 3
Revue champenoise et bourguignonne, 1904, p. 324
Revue de dialectologie romane, 1910, p. 133
Revue de linguistique romane, 2001, p. 238
Revue de philologie française, 1926, p. 119-123
Rolland (E), Gaidoz (H), Faune populaire de la France, 1877, p. 10

 

LES AUTEURS
Télécharger le nom, les origines et le patois de Courtisols

Henri d’ARBOIS DE JUBAINVILLE, archiviste-paléographe, professeur au Collège de France, Membre de l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres
Théodore BACHELET, agrégé d’histoire
Josiane BARBIER, maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Paris X
Edouard de BARTHELEMY, membre de nombreuses sociétés savantes
Paul BATAILLARD, ancien élève de l’Ecole des Chartes
Amédée BOUSSARD, chef d’escadron au 23e Régiment d’artillerie
Louis-François DU BOIS, historien et bibliothécaire ; Julien Travers, titulaire de la chaire de littérature latine à l’Université de Caen
Abbé BOITEL, chanoine honoraire de la cathédrale de Châlons-sur-Marne
Anatole BOUCHERIE, philologue
BRIDEL, ministre protestant dans le canton de Vaud
Charles BRUNEAU, linguiste et philologue
CAQUOT fils, vice-secrétaire-archiviste de la Société d’Agriculture, Commerce, Sciences et Arts de la Marne
J. CHALETTE, érudit local
Jacques CHAURAND, professeur émérite des Universités, directeur de la Nouvelle Revue d’Onomastique
Abbé Jules CORBLET, membre de plusieurs sociétés savantes
Albert DAUZAT, docteur en droit, professeur de philologie à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes
Geneviève DESVIGNES, érudite locale
Jean-Pierre-DEVROEY, docteur en histoire, doyen de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université libre de Bruxelles, membre de l’Académie royale de Belgique.
D’HERBES, membre associé correspondant de l’Académie de Châlons
Edélestand du MERIL, poète et philosophe médiéviste
Albert GIRAUD, médecin
Arthur GIRY, professeur à l’Ecole des Hautes-Etudes et de l’Ecole des chartes, membre de l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres
Adolphe GRANIER DE CASSAGNAC, Journaliste
GROSLEY, membre associé libre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres
Emile GUENARD, instituteur
Benjamin GUERARD, conservateur du département des manuscrits de la Bibliothèque impériale
Alexis GUILLEMOT, vérificateur des poids et mesures
Gabriel-Antoine A. J. HECART, érudit local du Valenciennois
HUBERT, chirurgien à Somme-Suippe
Daniel JALMAIN, archéologue
G. S. LAGNEAU , docteur en médecine
Elisée LEGROS, toponymiste belge
Emile LITTRE, lexicographe et philosophe
Auguste LONGNON, archiviste, professeur au collège de France, membre de l’académie des inscriptions et belles-Lettres
Robert LORIOT, docteur ès lettres, professeur à l’Université de Dijon
Ferdinand LOT, archiviste-paléographe, professeur à la Sorbonne, membre de l’Académie des Inscriptions et belles-Lettres
Jackie LUSSE, Maître de conférences honoraire à l’Université de Nancy II, adjoint au maire de Courtisols
Britta LÜTZOW, Université de Berlin
Achille MEISSAS, membre de la Société de géographie et Auguste MICHELOT, polytechnicien, membre de nombreuses institutions.
MEYER DE KNORNN, président de la Société d’Histoire de Zürich
Paul MEYER, philologue, directeur de l’Ecole des Chartes, membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres
Wilhem MEYER-LÜBKE, philologue suisse, professeur aux Université des Vienne puis de Bonn.
Francisque MICHEL, docteur ès lettres, professeur à la faculté de Bordeaux
M. MOLERI et Frédéric BERNARD
Alf MONJOUR, professeur à l’université de Duisburg-Essen
Ernest NEGRE, chanoine et toponymiste, professeur de philologie à l’Institut catholique de Toulouse
Claude NORMAND, chirurgien à Courtisols
Chanoine PANNET, doyen du chapitre de Châlons, vicaire général honoraire
Joseph M. PIEL, docteur de la faculté de philosophie de Bonn
Claude-Charles PIERQUIN DE GEMBLOUX, membre d’une cinquantaine de sociétés savantes
Joseph-Marie QUERARD, bibliographe
Jules QUICHERAT, professeur et directeur de l’Ecole des Chartes
Jean-Pierre RAVAUX, conservateur du musée de Châlons, docteur en histoire de l’Art
Onésime RECLUS, géographe
Dominique François Louis ROGET, baron de BELLOGUET, historien
Charles ROSTAING, professeur de langue et littérature d’oc à la Sorbonne
Dom Thierry RUINART, moine bénédictin de la congrégation de Saint-Maur
Emile SCHMIT, archéologue châlonnais
J. F. SCHNACKENBURG, docteur en philosophie, membre de la Société de l’Histoire de France
Reinhold SCHÖNIG, docteur en philologie romane
Michel TAMINE, professeur de linguistique à l’IUFM de Reims
Prosper TARBE, substitut du procureur du roi à Reims, correspondant de l’Institut
Antoine THOMAS, archiviste paléographe, docteur ès lettres, membre de l’Ecole française de Rome, directeur d’Etudes à l’Ecole pratique des Hautes Etudes, membre de l’Académie des Inscriptions et belles-Lettres
TOURNEUX, ingénieur en chef du département de la Marne
Françoise VACHEY, Université de Bourgogne, chercheure associée à la mission à la culture scientifique
Auguste VINCENT, toponymiste belge
J. VINCENT, bibliothécaire de Saint-Remi de Reims
Henriette de WITT, fille de François Guizot, femme de lettres